LA SOUPE PHO

LE VIETNAM - PARTIE 3

Marché Saigon

Le sud du Vietnam : Da Lat, le Mékong et Hô Chi Minh ville

Une fille rencontrée lors d’une visite m’avait dit « fais gaffe Hô Chi Minh, c’est intense, il y a beaucoup beaucoup de monde, et moi j’ai vraiment eu peur ». Autant dire que je n’abordais pas mon escapade à Hô Chi Minh de manière très sereine. Mais avant de découvrir cette ville bouillonnante, j’ai passé quelques jours à Da Lat, ville des hauts plateaux où le climat est plutôt doux. Da Lat est complétement différente de toutes les villes que j’ai eu l’opportunité de visiter au Vietnam. Pour être tout à fait honnête, elle ressemble à une ville européenne. Ancienne station climatique très prisée par les colons français, l’héritage architectural colonial est d’ailleurs très présent, elle s’étend autour d’un grand lac, et elle est entourée de prairies vertes et fleuries. Khanh de Hué m’avait confié « tu verras pour moi Da Lat c’est la ville de l’amour ». J’ai découvert que les jeunes couples passaient leur lune de miel là-bas quand ils en avaient les moyens. J’ai logé chez une famille qui possédait une petite auberge de jeunesse. Nous n’étions pas nombreux. J’ai arpenté la ville plusieurs jours, j’ai mangé dans différents restaurants, dont une boulangerie que l’on m’avait recommandée en self service avec des pains vraiment délicieux, dans laquelle on pouvait aller à n’importe quelle heure de la journée. C’était une sorte de cantine du coin presque uniquement rempli de vietnamien.ne.s. En général, c’est bon signe et je n’ai pas été déçue. Puis, un soir, la famille de l’auberge a convié tous les voyageurs à un repas convivial. Principalement composé de feuilles de riz, de garnitures, et d’herbes fraiches, on confectionnait nous-même nos rouleaux de printemps que l’on trempait vigoureusement dans plusieurs sauces, le tout arrosé d’alcool de riz.

C’est à cette soirée joyeuse que j’ai rencontré Romain, un trader français spécialisé dans le pétrole, vivant à Singapour, passionné par le café et le négoce. On a passé deux soirées à parler. J’étais absolument fascinée par son métier et ses anecdotes assez dramatiques - il faut le dire - sur le monde du pétrole. L’alcool et le voyage délient les langues parfois. En pleine quête de sens et avec l’envie de se tourner vers des activités plus vertueuses, il s’est plongé dans l’univers du café, ce qui l’a amené au Vietnam, pays producteur de café. Il m’a conseillé d’aller visiter une exploitation dans les montagnes labellisée commerce équitable, tenue par une famille vietnamienne depuis plusieurs générations. J’ai passé ma journée du lendemain là-bas avec un couple d’américains. L’exploitation est aujourd’hui gérée par une des femmes de la famille et son mari américain. Avec un anglais parfait, elle nous a expliqué en détail la production de café, et évidemment on a bu plusieurs tasses. Je suis repartie avec mes sachets de café vers mon auberge, puis direction Hô Chi Minh en bus couchette.

Je pose mes valises dans un hôtel du quartier touristique et je découvre. J’ai adoré Hô Chi Minh. Une sensation vertigineuse m’a parcourue dans les premières heures, du monde partout, du bruit, mais surtout une ébullition, qui ne m’a pas quitté. Je ne devais pas rester aussi longtemps, et pourtant j’ai décidé d’y revenir après quelques jours dans le Mékong. Je me suis sentie complétement en sécurité, et je n’ai éprouvé aucune difficulté. La population du Vietnam est jeune, on sent une envie d’avancer après tous les traumatismes d’antan, de regarder vers l’avenir, d’expérimenter, d’être créatifs. Je n’aime pas comparer des villes qui n’ont rien à voir, mais d’une certaine façon, Hô Chi Minh m’a rappelé New York : bouillonnante et impatiente. Très différente d’Hanoï, c’était une autre facette de Vietnam que je découvrais au fur et à mesure de mes pas : de l’ancien, du très moderne, l’héritage architectural colonial, des cafés hipsters très tendances, un musée sur la guerre du Vietnam avec une partie concentrée sur l’agent orange et ses dégâts encore bien visibles aujourd’hui (une partie du pays est d’ailleurs plus ou moins déconseillée à cause des mines encore présentes), et bien sûr des plats toujours aussi bons.

Au bout de quelques jours, je suis partie à Can Tho au niveau du Delta du Mékong, cerise sur le gâteau de ce voyage. J’avais choisi un lieu plutôt écoresponsable avec des cabanes en bois sur le Mékong tenu uniquement par des femmes du village. Je ne m’attendais à rien de spécial, j’ai encore fait de belles rencontres. Le deuxième jour, nous sommes partis à l’aube pour une navigation vers les marchés flottants du Mékong. On achète ses légumes et autres produits en allant de bateau en bateau. Mis en place pour palier au manque de routes entre les villages, les marchés existent toujours et font partie du patrimoine culturel du Mékong au Vietnam. Bien que le Mékong soit un fleuve d’apparence assez tranquille, il fait lui-aussi face à une surexploitation et une pollution plastique de plus en plus importante . Notre guide nous a expliqué qu’il ramassait à chaque traversée vers les marchés flottants des poches plastiques.

Mon dernier cours de cuisine a eu lieu là-bas, mais pour une fois pas de nems, ni de soupe pho : un ca cha (poisson grillé et nouilles de riz) et des banh khot (palets de riz aux crevettes). Je n’ai rien fait de spécial ensuite, j’ai juste profité de la vie. Parfois, ça fait du bien.

Je quitte le Vietnam après quelques jours à Hô Chi Minh (et un typhon) avec un mélange d’appréhension et d’excitation. Ce voyage m’a permis de découvrir des ressources que je ne soupçonnais pas. Je sais que j’y retournerais, je n’ai pas fait le tour de tous les plats, ni de tous les secrets culinaires. Ce pays avance très vite, j’ai encore plein de choses à découvrir. A la fin de mon carnet de voyage, j’ai noté « maintenant le plus important est de raconter des histoires grâce à la nourriture ». Voilà on y est.

Pour terminer ce long article, la promesse d’une recette qui m’a suivie tout au long de mes petits-déjeuners : une soupe phô.

Cours de cuisine vietnam

RECETTE

Ingrédients :

500g de plat de côte

1 os à moelle

3 oignons

1 morceaux de 10 cm de gingembre

1 c. à soupe de sel

5 c. à soupe de Nuoc mam (ou plus selon les goûts)

Les épices :

1 cardamone noire

 3 anis étoilées

1 bâton de cannelle

1 réglisse

10 clous de girofle

1 c. à c. de graines de coriandre

1 c. à c. de graines de fenouil

Pour servir :

500g de bœuf tendre

Une poignée de pousses de soja

400g de nouilles de riz

Le jus de 1 citron vert

Ciboules ciselés

Herbes fraiches (menthe, basilic thaï, coriandre longue…)

Plongez l’os et le plat de côte dans l’eau bouillante 15 minutes pour nettoyer les impuretés. Sortir les os et le plat de côte, les rincer à l’eau froide et nettoyer la marmite.

Les remettre dans la marmite, couvrez avec de l’eau froide et portez à ébullition ( ne pas bouillir) puis à feu doux avec un léger frémissement pendant environ 1h. Écumez régulièrement.

Mettez votre four sur grill, et faites griller les oignons et le gingembre pendant 10 ou 15 minutes (il faut que la peau soit presque brûlée, si vous avez la possibilité de le faire directement sur un feu, c’est encore mieux. A Hanoï, il mettait les oignons et le gingembre directement sur le gaz). Faites torréfier les épices dans une petite poêle pendant quelques minutes, puis les mettre dans le petit sachet de thé. Ajoutez les épices, le gingembre avec peau et les oignons non pelés au bouillon. Laissez sur le feu à petits frémissements encore 2h (environ). Écumez régulièrement.

Sortez plat de côte, les épices, les oignons et le gingembre. Rallongez le bouillon d’environ 1l d’eau et ajoutez les cuillères de nuoc mam. Laissez à petits frémissements encore 2h (pour être honnête, je laisse le phô longtemps sur le feu, je commence le matin et c’est un plat pour le soir, j’aime que le bouillon soit bien imprégné).

Vous pouvez commencer à préparer les nouilles de riz et le bœuf tendre. Coupez-le en fines lamelles. Réservez dans un petit bol. Taillez le plat de côte en fines tranches. Réservez. Plongez les nouilles dans une casserole d’eau chaude pendant 10 minutes. Préparez une portion dans chaque bol. Dans une louche, mettez quelques tranches de bœuf tendre et plongez-la dans le bouillon afin que le bœuf cuise légèrement. Transvasez dans le bol avec les nouilles, ajoutez du bouillon, des pousses de soja, un peu de ciboule ciselée, quelques tranches de plat de côte, des herbes fraiches et du jus de citron. Dégustez.

Vous pouvez rectifier l’assaisonnement avec du nuoc mam si besoin, ou un peu de sucre.