DORO WAT OU RAGOUT ETHIOPIEN

« Si je vous demande d’où vous êtes, que répondez-vous ? »

Un jour, deux amies proches ont découvert pour la première fois la maison dans laquelle j’ai grandi. Je les connais depuis plus de 15 ans, mais elles n’étaient jamais venues jusqu’à chez moi. Elles ont ainsi appris que j’avais toujours vécu dans cette maison, que l’ensemble de mes souvenirs d’enfant et d’adolescente se trouvaient à cet endroit : un village d’une cinquantaine d’habitants dans le nord Deux-Sèvres. Loin de tout. Proche de rien, sauf du Puy du Fou, mais bon. L’une d’entre elle m’a rapidement dit « au moins tu sais d’où tu viens, tu as un point de repère ». Ce week-end chez mes parents s’est déroulé il y a plusieurs années, mais cette phrase est restée très longtemps dans ma mémoire. « D’où viens-tu ? », c’est vrai que c’est une question que l’on pose souvent. En fonction de nos identités, de nos racines, nos réponses diffèrent. Il existe autant de réponses que d’individus. Pourtant, à cette question, chacun d’entre nous perçoit un lieu, une odeur, une sensation, un élément comme un point de repère qui définirait un lieu d’origine. Nous sommes tous et toutes habité.e.s par des lieux : un lieu de naissance, des lieux dans lesquels on a vécu seul.e ou avec sa famille, des lieux que l’on a fréquentés, des lieux projetés, des lieux imaginaires (sait-on jamais).

Au fond de moi, je sais que j’ai un sentiment d’appartenance très fort aux Deux-Sèvres (j’en parle d’ailleurs beaucoup), parce que tout me ramène là-bas dès qu’on me pose cette question. Les autres lieux constituent mon identité et ils lui donnent tous un sens, mais savoir d’où je viens me permet d’être encore plus ancrée ailleurs. Pourtant lorsque je rentre chez mes parents, je suis souvent envahie par une nostalgie presque étouffante. Rien de négatif, un sentiment qui me rappelle pourquoi j’ai souhaité vivre ailleurs.

Qu’est-ce qui fait que l’on se sente plus « d’ici » ou « d’ailleurs » ? A-t-on toujours besoin de se référer à un espace précis ?

La cuisine est un lieu en soi. L’acte de cuisiner et celui de transmettre créent des repères, que l’on soit consommateur, producteur ou spectateur, ils permettent de se situer, et de se construire dans un monde. La cuisine nous plonge dans une atmosphère, on ressent des odeurs, on aperçoit des gestes, souvent répétitifs, on développe une série de souvenirs gustatifs, on mémorise des recettes. Nos lieux d’origine ne sont pas uniquement géographiques. Ils se construisent à travers ce que nous vivons. Ce que l’on mange et ce que l’on ne mange pas en fait forcément partie.

Et vous, d’où venez-vous ?

Pour illustrer cet article, j’ai pensé à un plat que j’ai mangé à différents endroits : un Doro Wat. Un ragoût venant d’Éthiopie, réalisé avec du poulet, des œufs, un mélange d’épices berbéré, servi lors d’occasions spéciales. Il est souvent à la carte des restaurants éthiopiens. J’ai adapté la recette car je n’ai pas trouvé d’épices berbéré.

RECETTE

Ingrédients :

Un poulet découpé en morceaux (je demande à mon boucher de le faire)

4 œufs

1 kg d’oignons rouges émincés

1 1/2 cuillère à soupe de piment en poudre

2 cuillères à soupe de concentré de tomates

1 cuillère à café de cardamone

1 cuillère à café de gingembre râpé finement

750g de tomates en conserve

8 gousses d’ail hachée

50g de beurre

Huile végétale

Sel et poivre

Préparez des œufs durs. Réservez

Dans une marmite, faites rissoler les morceaux de poulet quelques minutes. Réservez.

Faites revenir 15/20 min les oignons émincés avec de l’huile et un peu d’eau pour éviter que ça accroche à feu moyen doux. Mélangez régulièrement.

Ajoutez le piment, le concentré de tomates. Mélangez. Versez les tomates concassées, le gingembre et la cardamone. Mélangez.

Ajoutez les morceaux de poulet, l’ail haché, et les œufs durs. Salez et poivrez. Laissez mijoter à feu doux 3h. Lorsque le poulet est bien cuit, réservez le plat 24h afin que les saveurs s’imprègnent bien. Faites-le réchauffer le lendemain avant de servir.

Il est habituellement servi avec de l’injera, un pain à la farine de teff. J’ai utilisé les paratha que j’avais réalisés le même week-end.